Alain Devignon est bien connu des anciens qui ont vécu le hockey des années 70. Les souvenirs qui remontent à cette époque trouveront des échos auprès de nombre de grandes figures du hockey belge.
Le jeune Alain débute sa carrière de joueur en Cadets au Parc. La photo ci-dessous, datant de 1958, le montre alors qu’il a déjà pris les guêtres de gardien.
« C’était Matou Legros qui était au goal. Mais il avait fait savoir qu’il n’aimait pas cette place et comme j’étais pas vraiment bon dans le jeu et que je jouais aussi au foot, on m’a demandé de prendre sa position dans le but. Je n’ai plus quitté cette place ! »
Dans cette équipe du Parc, on reconnait accroupis de gauche à droite : Patrick Demol, Guy Miserque, Alain Radelet, Michel Servais, Marco Bingen.
Debout : X, André Servais, Georges Wybauw, Michel Lambie, Marcel Doyen, Marc Legros, Alain Devignon, Alain Bingen et Freddy Buyse.
Cette équipe fut très brillante et évoluait en Scolaire lorsque la direction du club l’envoya en première pour faire remonter le club. « Cela a tellement bien fonctionné que le Parc est monté de 3 en supérieure puis en honneur en quatre ans. Je jouais en 1 en alternance avec Denis Houssein. Le Parc était un club réservé aux fonctionnaires des Travaux Publics et avait ouvert au Ministère de l’Education (dont faisait partie mon père) de façon à trouver suffisamment de membres. Lorsque le club fut bien fourni, la direction a écarté les membres de l’Education. Moi, cela ne m’a pas plu et je suis parti pour Anderlecht, en même temps d’ailleurs que Denis – on ne s’était pas concertés pour partir ensemble – qui est parti à Uccle Sport. »
Alain Devignon est un sportif multiple. Il a pratiqué plusieurs disciplines dont le tennis, le football, le handball et l’athlétisme. Spécialiste du 800 et 1500 mètres, il courait pour le Racing de Bruxelles où il a côtoyé Roger Moens. Il terminait 3e d’un championnat derrière Rudy Simon, lequel gagnait son ticket pour les JO. Officier du Génie, il rejoignait l’équipe militaire de hockey en 1968. BLS allait, sous la direction du Colonel Lesire puis du Colonel Francisse (un cavalier et boxeur qui représenta la Belgique aux JO), lui faire confiance pendant une dizaine d’années. « J’ai fait 3 championnat du Monde (Den Haag en 1973, 2e place, Fontainebleau en 75, 1er, et la Rasante 77, 1er ex-aequo avec les Pays-Bas). En dehors de ces championnats, il y a eu beaucoup de tournois au cours desquels j’ai rencontré beaucoup de hockeyeurs qui faisaient leur service militaire. Les Belges étaient connus pour mettre de l’ambiance et je me souviens de Bobob Maroye qui a mis une ambiance de feu à Fontainebleau. Ceci-dit, on était sérieusement préparé : physiquement, on était les mieux affutés avec un Gérard Knaepen – un grand Monsieur – qui n’avait pas son pareil pour nous tirer vers le haut. On disputait beaucoup de matches en semaine et en soirée. On a d’ailleurs inauguré les éclairages de plusieurs clubs comme l’Antwerp ou l’Avia : c’était vraiment basique, à peine plus fort que la lumière de bougies. Et pas question de bâcler les matches. Un jeudi soir, à Villeneuve d’Ascq contre la France et sur astro (mon tout premier match sur cette surface), on a perdu 0-4 : le colonel m’a envoyé vers les gars pour leur annoncer que tout le monde retournait à la caserne le lendemain matin ! »
Sélectionné en équipe nationale A, il se blessait le jour du match entre l’équipe militaire et les A. Il a alors joué en équipe nationale B, une équipe faite des joueurs qui servait de complément à la A.
Anderlecht, une fameuse aventure
Avec Anderlecht, qui jouait encore à Schepdael sur les terrains de la brasserie Eylenbosch (dont la gueuze décorait abondamment le bar), il a connu le bonheur de la remontée jusqu’en division 1 (la plus élevée) et même une finale de la Coupe de Belgique : « C’était contre Huy; le club hutois bénéficiait d’un but d’avance de par la différence de division avec nous. Le terrain était détrempé et Huy a bétonné; on a perdu 0-1. J’ai joué de 67 à 79, avec une interruption de 4 ans en 73 car j’ai été muté en Allemagne ; c’est alors que Jean-André Zembsch a pris ma place car il s’ennuyait à Uccle Sport où sa défense était trop bonne et il s’ennuyait. ». Anderlecht était une grande famille et toutes les sections se voyaient régulièrement. « On appelait ces jumelages entre section La Bise aux Mauves.«
L’équipe d’Anderlecht championne de division 2 en 1969 : on reconnaîtra Alain Devignon avant-dernier à droite, mais aussi Philippe Collin (3e accroupi en partant de la gauche qui participa aux JO), Alain Geens (5e accroupi), Philippe Van Camp (6e accroupis, un grand espoir du hockey belge et malheureusement décédé dans un accident de voiture), Bobo Bockstael (8e accroupi); debout Luc Geens (2e joueur debout en partant de la gauche), Ramon Appelaniz à la droite de Devignon.
Comme gardien, il a enduré la dure tâche d’entretenir son équipement après les rencontres. En cuir, les sabots et les guêtres se chargeaient de boue qu’il fallait enlever de retour à la maison. « La boue s’incrustait entre les guêtres et le pantalon, ça faisait lourd à la fin de la rencontre. Au niveau du masque, on jouait sans. Puis j’ai reçu une balle sur le visage : deux dents cassées. La mode est venue alors au casque de hockey sur glace, avec les grands barreaux ! Puis on est passé au Plexi et enfin au masque moulé en plastic blanc.
Sa vie sportive est bourrée d’anecdotes. « En 1973, il y a eu la crise du pétrole et les dimanches sans voitures; cela a duré des mois et c’était toute une expédition pour se rendre au match : bus, train, tram, puis déplacement en car jusqu’à la Gantoise. On partait le matin à 10.00 heures et on rentrait tard le soir. Je me souviens avoir joué en salle à l’Avia le soir où le toit s’est écroulé sous le poids de la neige; on est sorti juste à temps. » A propos de l’Avia, il se souvient que le club avait obtenu de la Cocof les crédits pour installer un synthétique, mais malheureusement les terrains étaient cédés la même année à l’OTAN pour y installer le nouveau site.
Alain Devignon a connu une brillante carrière à l’armée. Il fut Lieutenant-Général (le plus haut grade) pendant 10 ans, occupant la fonction de patron de l’Infrastructure. Sa connaissance du sport l’amena à créer en 2003, à la demande du ministre André Flahaut, une section Sport de Haut niveau. « Nous avons engagé des sportifs qui pouvaient apporter une plus-value à la Belgique et à l’Armée. Nous avons eu Marino Van Hoenacker qui a remporté l’Iron Man d’Hawaii, Brian Ryckeman qui est un nageur longue distance et qui est allé aux JO de Londres, plusieurs judokas ou encore Kevin Rans, un sauteur à la perche. Il ne s’agissait pas de créer un Bataillon de Joinville, mais d’aider des sportifs en leur assurant un confort financier tout en permettant de pratiquer le sport de haut niveau et de bénéficier après leur carrière sportive d’un reclassement. »
Alain Devignon vit une retraite active. Il est président du conseil d’administration de Vivat, une asbl qui vient en aide à des handicapés mentaux. « C’est très prenant. Nous pouvions compter sur le Jumping de Duisburg qui nous rapportait chaque année 40.000 euros. Malheureusement, le centre sportif de la Défense va être vendu et il faudra trouver une autre source de revenu pour soutenir cette association. Je suis bien sûr le hockey qui a fameusement évolué. Cela a beaucoup changé évidemment. De mon temps, on faisait surtout attention à ne pas toucher la balle du pied tellement les terrains étaient mauvais. Comme gardien, je devais nettoyer mes guêtres qui se couvraient de boue.Il fallait d’ailleurs les préserver et je me souviens qu’on avait plus de terrains qu’il n’en existe actuellement. Aujourd’hui, un synthétique permet de jouer 10 fois plus. Ce qui me réconforte, c’est que l’esprit du hockey est toujours là. Quand on voit nos trois Red Lions qui ont été invité à la Tribune de la RTBF et la tirade de Philippe Albert : ces trois jeunes-là, ils sont venus dans des voitures normales, ils sont bien habillés, ils parlent correctement. »
un stroke face à Cadou Gilles
Plaisir de revoir cette grande page de ma vie….Alain,ami depuis très longtemps et l’image de mon idole, Philippe van Camp, trop tôt parti ….Schepdael et tous ses bons moments. Une grande famille bien largement effacée par la grande faucheuse. Et si nous passions ensemble une soiree..?
Sur la photo de 1969, il n’y a qu’un seul Geens (Alain). Ni Luc, trop jeune et Marc encore en scolaire…
Sur la photo de 1977 :
En haut de gauche à droite : Appelaniz (assistant coach), Mendel B, Hache Henri (président), Mondele (coach), Vernimmen P, Ramboux, Geens M, Mendel M, Walters M, Rodaer M
En bas de gauche à droite : Geens A, Frère F, Vanhoeydonck M, Devigon, Degreef M, Parser