Dans le récent Hockey Player magazine, Bernard Lescot expliquait comment son club avait sauté sur l’occasion pour se remettre complètement à neuf durant le premier confinement.
Durant 125 jours, les deux terrains ont été remis à neuf, le club house a pris un coup de fraîcheur, deux padel ont été construit et le parking a été réaménagé. Avec en plus une nouvelle tribune assise.
Lors de cet entretien, l’administrateur-délégué du Léopold nous a donné nombres d’informations qui peuvent être inspirantes, même si le cas du Léo est atypique. Le Léopold, c’est une société anonyme, avec un conseil d’administration, un administrateur délégué, des employés et des collaborateurs,mais aussi des bénévoles.
La clé, les bénévoles
La base des transformations du club, c’est une équipe de personnes qui ont pu se libérer pour imaginer les changements, les mettre en oeuvre et jouer le moteur du changement. Ce club est un vraie PME avec 40 équivalent temps-plein. 80 personnes qu’il faut gérer, surtout pendant la crise : « Elles ont pu bénéficier du droit passerelle. Lors de la gestion de ces dossiers, je me suis rendu compte que tout est différent si l’on habite à Bruxelles en Flandres ou en Wallonie : impossible d’avoir une unité de gestion pour les clubs sportifs qui sont sis dans des régions différentes. Invraisemblable dans un petit pays comme le nôtre. On a un conseil d’administration avec des gens qui sont des spécialistes dans des domaines financiers, commerciaux, dans les techniques de gestion : c’est une des clés du succès. Chaque club doit s’inventer dans les limites de son statut; nous sommes un club atypiques et nous n’avons certainement pas de leçons à donner aux autres clubs. On s’aide entre clubs, on fait le même job. C’est comme ça que le Racing nous a aidé lors de la reprise en nous proposant leur terrain le week-end. »
Un gros budget à gérer
Le Léopold, c’est 5,5ha de terrain avec un chiffre d’affaire de 5 millions d’euros. 3 millions pour le club, réparti entre les sections, 600.000 pour les indépendants et 1,5 million pour le bar. « Il faut rappeler que nous sommes un SA et que nous n’avons jamais reçu une seul euro de subside ; ah, si ! 10% du budget pour l’établissement de notre centre fitness qui était considéré comme une nouvelle activité économique. Mais c’est tout. Les autres clubs bruxellois, à part le Racing qui est similaire, reçoivent des budgets des communes et des régions. Je connais un club qui n’a pour seule charge que 100.000 euros par an pour occuper son club; chez nous, 100.000 euros, c’est juste l’amortissement de mes deux terrains. On doit se battre pour avoir des revenus complémentaires : on organise des évents pour nos sponsors, on a un business club. On loue certaines installations : on s’ouvre à la société civile. Mais on est strict pour ne pas priver nos membres de leur espace et on reste dans les limites de nos activités : on ne ferme jamais complètement à nos membres. »
La crise covid
Le club a bien passé la première crise et a offert des compensations. La seconde est évidemment solide. « On a une trésorerie bien gérée qui permet de moduler nos budgets. Tout le monde a joué le jeu et nos banquiers ont également adapté nos remboursements : nous ne dépensons que ce que nous avons. Nous avons un budget par section et elle se débrouille avec lui. Je suis sidéré par certains budgets; il faut rester raisonnable et ne pas dépendre de l’une ou l’autre personne, c’est très compliqué, ça risque d’exploser. La licence va arriver et elle va apporter plus de régulation : c’est fini avec les visas vacances pour les joueurs, tout le monde est sur le payroll, avec les charges sociales. Payer avec des enveloppes, ce n’est pas sain. Le jour où la madame enveloppe part, l’équipe s’écroule. La licence ne va pas empêcher le mécénat : il faut que cela apparaisse en clair dans budget. » Bernard Lescot est aussi assez clair avec tout ce qui est argent mal contrôlé. « J’ai travaillé 36 ans dans une grand boîte sans aller en prison : je ne vais pas faire des bêtises pour mon club de hockey qui est mon loisir. C’est pour ça que jamais je ne mettrais le bar dans l’organisation interne du club : je préfère sous-traiter. Je ne gagne pas beaucoup d’argent avec le bar mais je n’ai aucun souci avec ça; la gestion d’un bar, c’est très compliqué. » Avec la crise, le club va recevoir 35.000 euros de la Région pour la perte d’exploitation du bar. Une consolation tout de même.
Etre au top, garant des soutiens
Le Léopold a toujours côtoyé le haut du classement. Important ! « Effectivement, si une année, nous terminons 10e du championnat, cela n’aura pas d’impact sur le soutien de nos partenaires. Mais il ne faut pas que cela dure trois ans. Nos sponsors ont besoin de visibilité. Ils viennent principalement pour nos membres et pour le potentiel qu’ils représentent. Le hockey est un sport qui appartient à une catégorie d’une classe élevée et on le voit : toutes les private banking se disputent nos clubs, idem pour les marques automobiles. » Bernard Lescot parle pour les Messieurs. Les Dames ont moins d’importance dans cette optique. « Oui, mais attention, la croissance du hockey passe par les femmes. En terme de sponsoring, avoir une équipe au top, cela n’a pas beaucoup d’influence. Par contre, c’est important pour le club lui-même; elles font plus la fête que les Messieurs (NDLR : comprendre elles sont plus dynamiques, organisent plus d’activités, sont plus présentes) elles occupent une place dynamique et offrent plus de croissance. Miser sur les Dames, c’est bien, mais il n’y a pas d’image. »
En terme de média et de communication, le Léoman n’a pas sa langue en poche. « Le hockey est le sport le plus bête du monde : on y dépense beaucoup d’argent et il n’y a pas d’argent à y gagner. Eleven a payé 500 millions de droit pour montrer le plus mauvais football d’Europe alors, que jusqu’à l’année passée, le hockey payait 8.500 euros par an pour passer à la télévision alors qu’on est presque le meilleur championnat au monde; heureusement depuis la saison passée, on ne paye plus. Avec en plus des conditions invraisemblable où on nous oblige à jouer à midi. On est champion d’Europe, champion du Monde, vice-champion olympique, mais au niveau média, on n’y est pas. Nous, nous refusons de jouer à midi : cela met en l’air la vie du club. »